[Les fonds de tiroir] Le corps Exquis
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[Les fonds de tiroir] Le corps Exquis

Lun 20 Mai - 23:16



Une fois n’est pas coutume, je vais vous parler d’un livre. Un livre qui m’a particulièrement et profondément marquée, et que je tiens à partager même si les lignes qui vont suivre risquent de vous rebuter plus que de vous donner envie.

Ou, qui sait, peut-être que votre curiosité sera piquée, mais en toute honnêteté, ce livre-là n’est pas à mettre entre toutes les mains. Donc, si vous tenez à votre innocence, revenez quand vous aurez l’âge légal. Mais pour les autres, le voyage commence ici et il risque de piquer un peu. :3

Le Corps Exquis
(Exquisite Corpse – « cadavre exquis »)
Poppy Z. Brite
Editions J’ai Lu, 1996


[Les fonds de tiroir] Le corps Exquis Corps

Laissez-moi d’abord vous expliquer que « Poppy », née Mélissa Ann Brite et devenue plutôt Bobby que Poppy, est un écrivain américain dont l’œuvre est principalement composée d’histoires qui mélangent horreur et homosexualité – le reste de son travail se composant essentiellement d’homosexualité sans horreur. En l’occurrence, le Corps Exquis est l’un de ses romans les plus connus, un des premiers à avoir été traduit en français, et si vous voulez vraiment savoir de quoi ça parle, je vous répondrai que ça parle, eh bien… de gays.
De tueurs gays.
Nécrophiles.
Et cannibales
.

Vous êtes toujours là ?

Bien, pour ceux qui ont le cœur encore assez accroché, je vais expliquer qu’il ne s’agit pas exactement de ça. Enfin, si. Mais ce n’est pas seulement ça.

« J'ai tué la plupart de mes 23 garçons à l'arme blanche. [...] J'appréciais la beauté qui parait alors leur corps, les étincelants rubans de sang courant sur leur peau de velours, leurs muscles qui s'ouvraient en frémissant comme du beurre doux. [...] Le parfum de la mort ne me déplaisait pas. Il m'évoquait des fleurs coupées ayant trop longtemps séjourné dans une eau stagnante, une senteur lourde et maladive qui colle aux cloisons nasales et s'insinue au fond de la gorge à chaque souffle. »


Le Corps Exquis, certes, ça parle de tueurs. D’hommes qui récupèrent des drogués au coin des rues et leur font miroiter un bon lit et un repas, peut-être quelques attentions un peu plus charnelles, et qui se réveillent le lendemain aux côtés d’un cadavre livide, ouvert des côtes au pubis, avec la sensation d’avoir passé une bonne nuit. Ca parle de ces mêmes hommes qui vivent avec leurs petits amis inanimés comme si de rien n’était, jusqu’à ce que l’odeur n’attire les voisins, et qu’ils soient obligés de s’en débarrasser, pour ensuite en trouver un autre. Ou ces mêmes hommes qui gardent les morceaux de leurs victimes dans un frigo, pour pouvoir se nourrir de leurs entrailles.
Ca parle aussi des quartiers gays dans les années 80, des fêtes pleines de substances illicites, des échanges de fluides sans protections avec des presque-inconnus, des dépistages tous les six mois pour éviter à ce qu’on appelait alors la "peste gay", mais qui n’étaient qu’une sorte de compte à rebours parce qu’ils savaient bien qu’ils finiraient par tous l’avoir et que le reste du monde les laisserait pourrir dans leur coin.
Et puis ça parle d’amours à sens unique, d’amours rendus compliqués voire impossibles parce que ce qui excite ce gars-là, c’est l’odeur du sang ; parce que celui-ci préfère son petit ami quand il dort ; parce que celui-là est mort du sida et que son copain va se jeter dans le fleuve parce qu’il ne peut pas vivre sans lui.

« Ses invités devenaient ses amis une fois morts, mais c'étaient là des amis sans surprise :
ils lui appartiendraient pour toujours car ils ne pourraient jamais le quitter. Un être-vivant pouvait décider de tirer sa révérence. Une telle absence de loyauté est hors de portée des têtes momifiées et des os récurés.
Tous les garçons de Jay finissaient par faire partie de lui. Ils restaient avec lui pour l'éternité,
la chair de sa chair, ses amours intérieures. »


Et vous voyez où je veux en venir ? Ce bouquin est ignoble de bout en bout. Ca parle de trucs dégueulasses, moralement inacceptables, c’est écrit dans un langage parfois tellement cru que ça vous mettra mal à l’aise, mais c’est aussi écrit comme si c’était une histoire d’amour. C’est une histoire d’amour. Et du coup, on compatit. Même quand deux tueurs parlent de bouffer ensemble le gamin rencontré un peu plus tôt, parce qu’ils en parlent comme un cadeau qu’ils s’offriraient. Même quand cet autre raconte que son ex a voulu lui refiler son sida, parce que ce que ça dit, c’est que ce gars était terrifié à l’idée de mourir seul.

Alors, voilà. C’est sûrement une expérience très dérangeante que de lire ce livre. Et le malaise ne viendra peut-être pas du fait de lire des horreurs, mais plutôt du fait de vouloir les apprécier. Mais c’est quand même quelque-chose que je vous invite à tenter. Lisez ce livre, voyez jusqu’où vous pouvez aller avant de faire une grimace de dégoût. Dites-moi ce qui vous a repoussé, ce qui vous a étrangement laissé de marbre. Et dites-moi si vous aussi, vous avez pleuré parce que vous auriez voulu une fin plus heureuse.

« Ne renonce jamais à tes terreurs lui ai-je dit. Ou sinon elles te rattraperont.
Quelle est ta plus grande terreur Jay ?
Il a répondu sans hésiter un instant. Sa voix sonnait creux :
"La solitude". »
Kana
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fan-girl féministe

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Mar 21 Mai - 20:26



... C'est... Whow.

C'est extrêmement perturbant. Et dégueulasse. Et t'as fait un très bon article encore une fois parce que tu fais passer ça à merveille. Enfin, j'espère, parce que sinon ça veut dire que c'est encore pire que ce que tu décris. /D

Blergh. J'en frissonne beaucoup et j'ai des spasmes. è_é
C'est vraiment abominable.

Mais comment t'as connu ça? Et pourquoi l'avoir lu? C'est un choix plus qu'étrange. :U

J'vais dire un truc d'idiot qui n'a rien compris, mais il faut être un peu psychopathe pour aimer lire ça, sérieux. Comme je t'ai dis rapidement sur Skype, j'y cherchais de l'humour noir, ou un humour par le super-trash super gore. Mais ça ne semble pas du tout écrit pour ça. T'sais il manquerait plus que "ceci est tiré d'une histoire vraie." dit avec une voix grave par un agent du FBI, et t'obtiens un truc ... affreux?
J'ai pas les mots, j'en perds vraiment mes mots.

Mais ouais, la solitude c'est pas cool. /PAF/

(en tout cas, bravo l'article. u_u)
Koten
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Mar 21 Mai - 20:48



Eh bah mine de rien, j'aime bien. J'ai toujours aimé les histoires de psychopathes (d'ailleurs il y a un super film là dessus, ça s'appelle Maniac et c'est perturbant <3), donc là j'ai vraiment l'impression d'être servi.
Par contre je sais pas si je vais le lire ; le bouquin va sûrement se dresser dans une bibliothèque, enchaîné tel un Necronomicon, et avec "NE PAS OUVRIR" gravé dessus.
Il faut pas forcément être taré pour lire ça, il faut être taré pour écrire ça °A°
Screw
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t ki

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Mar 21 Mai - 20:59



J'ai connu ça par hasard à vrai dire, par une amie d'amie qui l'avait lu et qui me l'a prêté en me disant "franchement, c'est dégueu mais c'est super bien". Et comme j'aime bien faire des expériences nouvelles, j'ai essayé.

Peut-être qu'il faut être un peu psychopathe pour aimer, oui. /D Je sais pas, je ne suis pas capable de m'auto-diagnostiquer. :P Ceci dit, je ne sais pas si le but, c'est qu'on aime. Je pense que c'est fait pour choquer. Pour laisser une sale impression. Et la force du livre, c'est que tu arrives à l'aimer malgré ça, ou mieux, à cause de ça. Il réussit tellement bien à te dégoûter que tu continues parce que t'as envie de voir jusqu'où tu vas le supporter.

Et pour être tout à fait honnête, d'ailleurs, c'est peut-être encore pire que ce que je décris. Parce que je vous ai dépeint les tableaux morbides, les réflexions dépressives et les idées tordues, mais je vous passe sous silence les scènes de sexe explicites et les descriptions d'une précision médicale sur la façon dont on découpe un corps. Il faut avoir le cœur plutôt bien accroché. :U

Peut-être aussi qu'on peut aimer, mais je ne sais pas si ça fonctionne pour tous, parce qu'on est pris au piège entre l'ignominie du fond et la poésie de la forme. Moi ça m'a pris dès la première phrase. C'est superbement bien écrit. Oui, les histoires sont ignobles mais le rythme est parfait, chaque mot est à sa place, on dirait presque de la musique. Je sais pas si Poppy Z. Brite est taré, mais en tout cas, il sait ce qu'il fait et il le fait remarquablement bien. °A°
Kana
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fan-girl féministe

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Mer 22 Mai - 14:27



Ca m'intrigue vachement. J'ai bien envie de le lire du coup (j'aime les histoires de psychopathe moi aussi). Par contre pas maintenant, je le supporterais pas xD.
Waffy
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Lun 20 Oct - 19:26



Je remonte tout à fait inopinément ce sujet parce que :

[Les fonds de tiroir] Le corps Exquis Tumblr_ndrciiKFUL1reznmgo1_500

Il est arrivé aujourd'hui <3 Il sent un peu la cigarette mais il est en parfait état. Les pages sont toutes douces. <3
Je suis tellement heureuse. <3 <3 <3
Kana
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